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TVA et para-hôtellerie : La délicate question de la preuve de la fourniture des services

 

Les locations de meublés de tourisme assortis de la prestation de services de para-hôtellerie entraînent, sous réserve des précisions récentes du Conseil d’État (lire notre bulletin sur ce sujet, complété par notre dernière brève), l’assujettissement de la location à la TVA.

 

Pour rappel, et tant que la loi et la doctrine ne sont pas modifiées sur ce point, la para-hôtellerie se caractérise par la prestation de 3 au moins des 4 services de l’article 261 D 4° b du CGI : le petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception de la clientèle.

 

Dans un arrêt d’espèce du 17 juillet 2023, la Cour administrative d’appel de Paris rappelle que, s’il est admis que l’exploitant ne fournisse pas effectivement tous les services tant qu’il est en mesure de le faire, encore faut-il qu’il puisse le prouver efficacement.

 

L’affaire

 

Dans cette affaire, une SCI avait demandé le remboursement d’un crédit de TVA à raison de son activité para-hôtelière. L’administration fiscale avait refusé ce remboursement, faute pour elle de fournir 3 des 4 services précités et notamment le petit-déjeuner et le nettoyage des locaux.

 

Devant les juges administratifs, la SCI faisait valoir que si elle ne proposait effectivement pas de petit-déjeuner, elle était en mesure de procéder au nettoyage régulier des locaux, sur demande.

 

Devant la Cour, celle-ci produisait notamment :

  • Un bail conclu pour cinq semaines sur la période comprenant des prestations de ménage de trois fois quatre heures par semaines ;
  • Une facture d’une société de nettoyage faisant état de 52 heures de prestation ;
  • Un contrat conclu avec une société de conciergerie prévoyant des prestations de ménage moyennant une tarification supplémentaire.

Les juges rejettent ces éléments, qu’ils jugent insuffisamment probants dès lors que :

  • le bail n’avait été produit que devant les juridictions et était conclu entre la SCI et un de ses associés ;
  • la facture de la société de nettoyage n’était pas suffisamment probante, le contrat avec la société en question n’ayant pas été produit ;
  • le contrat conclu avec la conciergerie prévoyant que le ménage était en supplément, celui-ci ne permettait pas une prestation de service dans des conditions analogues à celles des hôtels.

La Cour estime ainsi que « la SCI n’apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu’elle disposait, pour la période concernée, des moyens nécessaires pour répondre à d’éventuelles demandes de ses clients relatives au nettoyage régulier des locaux. »

 

Les évolutions récentes

 

Cet arrêt doit être rapproché de l’avis récent du Conseil d’État (CE, 8ème et 3ème chambres réunies, 5 juillet 2023, n°471877) rendu en la matière qui vient de préciser que :

  • l’article 261 D 4° b du Code général des impôts est incompatible avec les objectifs de l’article 135 de la Directive TVA en ce qu’il conditionne l’application de la TVA au seuil fixe de trois des quatre prestations visées par le texte ;
  • ce même article n’est pas incompatible avec la Directive en ce qu’il conditionne l’application de la TVA à la réalisation de prestations « rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle » ;
  • la qualification d’une location para-hôtelière doit être réalisée selon une approche concrète en retenant un faisceau d’indice tenant compte notamment de la durée minimale du séjour (outre les autres critères classiques).

Or, le fait de prévoir un supplément de prix pour la réalisation du nettoyage régulier des lieux loués pouvait paraître comme ne correspondant pas aux pratiques hôtelières.

Étant relevé qu’au cas d’espèce et contrairement à l’avis du Conseil d’État, la Cour administrative n’a pas retenu de critère de durée minimale du séjour dans son analyse

 

En attendant une réforme éventuelle des conditions d’assujettissement à TVA de l’article 261 D 4° b du CGI, l’appréciation des conditions de prestation des services, particulièrement casuistique, n’a pas fini de faire couler de l’encre et il est recommandé aux exploitants de meublés para-hôteliers de se ménager la preuve de leur capacité réelle de fournir les services para-hôteliers.

 

CAA Paris, 5e ch., 17 juill. 2023, n° 22PA00474

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